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Vercelli Homily XX
Par Karine MOREAU-GUIBERT
Publication en ligne le 16 janvier 2013
Texte intégral
1/332/ Mes bien chers frères, ce sont les jours saints et salutaires et médicinaux à nos esprits et il convient que nous les observions bien par le jeûne et par l'aumône et par de saintes prières et en allant en pèlerinage et en ayant des comportements humbles et avec la ferveur de tout notre coeur. Et laissons de côté nos vaines discussions, tant lorsque nous partons en procession avec les reliques que lorsque nous allons dans les églises, car moins nous venons au temple de Dieu et plus cela plaît au Diable. Et quand nous sommes à l'intérieur, sans doute si nous y faisons tout sauf ce qui est commandé dans les livres sacrés, le Diable nous enseigne alors tout autre chose. Il vaut mieux pour tout un chacun que nous n'allions jamais dans les églises plutôt que d'y aller si nous voulons y poursuivre des discours vains et y penser des pensées vaines, car le Diable après notre trépas, tous les vains discours et les mots stupides que nous avons dits et toutes les pensées inutiles que nous avons eues en cet endroit, tout ça, les démons le rejettent sur nous après notre mort, sauf si nous voulons les abandonner avant.
2/333/ Nous avons lu dans les livres sacrés qu'il y avait sur la terre un certain homme illustre qui était le prophète de Dieu et dont le nom était Elias. A son sujet il est écrit dans les livres sacrés, qu'à cause de l'impiété de son peuple avec qui il vivait et de leurs mauvaises actions, il pria Dieu pour qu'il ne pleuve pas pendant trois ans et six mois. Et immédiatement, comme il s'aperçut par la suite et comprit que ce peuple se soumettait à Dieu, de nouveau il pria hâtivement Dieu qu'il produisit la pluie sur les fruits du pays et il fut aussitôt exaucé1. Il nous faut prendre plus garde et repousser nos erreurs et la fornication et les repas hâtifs et l'ivresse et la trahison et l'orgueil et la colère et la gourmandise et la luxure et la disgrâce et la frivolité et les vains discours et tous les maux, de peur que Dieu nous afflige à cause de notre désir pernicieux en ôtant les fruits de la terre et que de plus, il nous soumette à une souffrance que nous ne pouvons supporter. Mais au contraire, il faut sans cesse que nous payons la dîme humblement, pour tout le bien que Dieu ici dans ce monde nous accorde ; alors le Seigneur nous accorde plus largement ses neuf parts. Et /334/ à propos de ces neuf parts, donnons avec conviction l'aumône aux pauvres de Dieu car le don de l'aumône libère les pécheurs du péché et de la mort, et de même que l'eau éteint le feu, le don de l'aumône annule le péché de chaque homme qui donne généreusement.
3Le jeûne et la charité doivent être observés par tous les hommes chrétiens car le jeûne est une chose sacrée ; c'est un acte divin, c'est la porte du royaume des cieux et c'est le symbole du monde à venir, et celui qui le fait saintement est lié à Dieu et il est éloigné de ce monde ici-bas et devient spirituel. Ainsi, le péché est vaincu et la chair mortifiée et ainsi, les tentations des démons sont vaincues, et celui qui jeûne de bon gré a une grande valeur aux yeux de Dieu. La charité est l'exaucement et l'accomplissement de toutes les bonnes choses et elle est sacrée ; elle prolonge le présent, elle diminue les péchés, elle multiplie les années, elle anoblit le cœur, elle efface les erreurs, elle purifie toutes les choses et elle libère de la mort et des châtiments. Elle unie l'homme qui la pratique aux anges de Dieu et elle l'éloigne des démons ; elle est un mur invincible autour des âmes et elle chasse les démons et /335/ elle appelle les anges à l'aide et voyage à travers le ciel ; elle précède le donneur dans la splendeur du royaume des cieux, elle frappe à la porte du royaume des cieux, réveille les anges à nouveau et avec eux, elle appelle le Seigneur tout puissant à l'aide pour ceux qui la donne aimablement et généreusement. Il y a trois sortes d'actes de charité. La première est matérielle : que l'homme donne ce qu'il peut donner comme bienfait aux pauvres. La deuxième est spirituelle : que l'homme pardonne à celui qui a fait du mal aux autres tout ce qu'il lui reproche. La troisième est que l'homme guide les plus égarés sur le chemin de la vérité.
4Mes bien chers frères, pratiquons toujours consciencieusement à la fois le jeûne et l'acte de charité et protégeons nous instamment contre les huit péchés capitaux qui blessent continuellement les âmes des hommes, offensent Dieu, réjouissent les démons et amènent en enfer chacun d'entre nous qui les commet jusqu'à leurs tous derniers jours. Le premier péché capital est l'orgueil, il est appelé le roi de tous les maux. A cause de lui les anges des cieux tombèrent en enfer et s'adonnèrent aux démons. Il est considéré comme le point de départ de tous les péchés et est souvent à l'origine du mépris des commandements de Dieu. Et quand l'orgueil est exulté par les bonnes actions, alors l'homme se traite et s'estime meilleur que les autres. En vérité, il /336/ génère toute désobéissance, présomption, dispute, erreur, vantardise et de nombreux autres maux. Mais la véritable humilité peut venir à bout de tout ça.
5Le second péché capital s'appelle donc la gourmandise ; c'est un désir démesuré aussi bien de nourriture que de boisson. A cause de lui, les premiers parents de la race humaine détruisirent le bonheur du royaume des cieux et furent précipités dans cette misérable vie, dans laquelle chaque homme est mis au monde à travers le péché, vit dans la peine et meurt dans la douleur. Elle est observée chez les hommes gouvernés par trois règles qui sont, bien avant leur désir pour une période plus juste, de manger de la nourriture et de boire des breuvages, et ce que l'homme aime encore plus en chacun d'eux, c'est qu'il n'y ait aucune limite. A partir d'eux sont apparus la gaité excessive, les actes de disgrâce, la frivolité, le vain discours, l'impureté du corps, l'instabilité de l'esprit, l'ivresse, la luxure et beaucoup d'autres maux innombrables. Mais ceci peut être maitrisé au mieux par le jeûne et par l'abstinence.
6Le troisième péché capital s'appelle la fornication qui représente toute l'impureté corporelle. Elle a donné naissance à l'aveuglement du cœur /337/ la faiblesse des yeux, les jeux insensés, la luxure, la non-abstinence générale, la haine des ordres de Dieu, l'insouciance pour la vie à venir et beaucoup d'autres choses encore. Néanmoins, le véritable amour, l'abstinence, le souvenir du feu éternel et la crainte de la présence de Dieu peuvent triompher de tout cela.
7Le quatrième péché capital s'appelle l'avarice ; c'est une immense avidité aussi bien pour avoir des richesses que pour les garder et c'est en vérité une peste insatiable. Tout comme quand l'hydropisie de l'homme augmente, sa soif augmente et plus elle devient forte plus il boit, de même plus l'homme avare a, et plus il veut. Les différentes sortes d'avarice sont l'envie, le vol, le préjudice, les homicides, le mensonge, les jugements déloyaux, le mépris de la vérité et beaucoup d'autres maux. Elles sont véritablement vaincues par la crainte de Dieu, par un réel amour [fraternel] et par l'acte de miséricorde.
8Le cinquième péché capital s'appelle la colère, qui rend tout homme inapte à développer entièrement son raisonnement. Elle engendra l'arrogance de l'esprit, les querelles, les souffrances, la fureur, le blasphème /338/ l'effusion de sang, l'homicide et l'envie de causer des dommages. Tout ceci est aisément dominé par la patience et la tolérance et par l'intelligence lucide que Dieu ensemença dans l'esprit de l'homme.
9Le sixième péché capital s'appelle la paresse ; elle nuit très souvent d'une façon sévère à celui qui veut servir Dieu, car l'esprit erre dans toute chose. C'est le péché le plus susceptible de chasser les moines de leurs monastères dans le monde, et de les écarter de leur règle de vie canonique pour les envoyer dans le puits des péchés. On lui attribue la léthargie, la fainéantise à faire les bonnes actions, la faiblesse du lieu, le vagabondage de site en site, la plainte, le vain discours et beaucoup d'autres maux. Elle peut néanmoins être dominée par la pratique de la lecture, par l'assiduité aux bonnes œuvres et par le désir de la récompense du bonheur à venir.
10Le septième péché capital s'appelle la tristesse. Il y a en fait deux sortes de tristesse ; la première est salutaire et la deuxième est mortelle. La tristesse salutaire est en fait la tristesse de l'esprit de l'homme pécheur pour ses péchés. La deuxième en vérité mes très chers frères, la tristesse de ce monde engendre la mort /339/de votre âme et elle ne peut servir à aucune chose dans les actions salutaires mais elle trouble la raison et souvent conduit l'esprit de l'homme au désespoir. On lui attribue à juste titre la méchanceté, le trouble de l'esprit, la faiblesse et l'amertume ; avec elle il n'existe aucun désir de la vie actuelle. Elle peut assurément être surmontée par une joie plus spirituelle, par l'espoir des bonnes choses à venir et par l'aide des Saintes Ecritures.
11Le huitième péché capital s'appelle la vanité. C'est en vérité une vaine glorification : quand l'homme aspire à être le seul maître de ses biens et n'accorde aucun honneur à Dieu, lorsqu'il ne reconnait pas non plus à l'autorité divine quoiqu'il fasse de vertueux mais agit comme s'il avait fait tout ça par lui même ; pourtant l'homme ne peut obtenir aucune chose de favorable sans la grâce de Dieu, comme il l'a dit lui-même à ses disciples: "Que vous ne puissiez faire aucune chose sans moi". Et quand, en vérité, de la source de ce péché naissent la vantardise, l'arrogance, la colère, la discorde, l'avarice et la supercherie dans les actes vertueux, alors l'homme désire qu'on lui attribue ce qu'il ne peut même pas faire. Mais il y a à cette maladie un remède, le souvenir de la vertu spirituelle, grâce auquel nous sommes entièrement pardonnés, nous qui dans ce monde en sommes pourvus, et le véritable amour éternel de Dieu celui-là même pour lequel nous devrions chanter les louanges, quoique /340/ nous fassions dans ce monde ; et nous devrions ensuite supplier pour que nos péchés soient jugés par Dieu au jour de la récompense éternelle, plutôt que par n'importe quel homme dans la conduite de cette vie prophétique.
12Voilà mes très chers frères, les huit péchés capitaux avec leurs armées qui chaque jour luttent contre l'homme. Ce sont les braves et forts guerriers du Diable opposés à la race humaine qui sont aisément terrassés grâce aux assistants de Dieu, par l'armée pacifique de combattants de première classe du Christ. Tout d'abord, la vanité est maitrisée par l'humilité, la gourmandise est vaincue par l'abstinence, la fornication par la propreté, l'avarice par la générosité, la colère par la patience, la paresse par la diligence aux actions de grâce, la mauvaise tristesse par le bonheur spirituel et l'orgueil est conquit par la pureté de Dieu et par beaucoup d'autres vertus que sont la prudence, la justice, la force et la modération.
13Il est donc en vérité primordial pour tous les hommes de chercher et de méditer sérieusement sur ce qu'est le pouvoir de son esprit. La force de l'esprit est /341/ l'apparat du genre humain, la grâce de la vie, l'acceptation de la moralité, la vertu, le culte de Dieu, la gloire des hommes et la récompense de la joie éternelle ; voilà les vertus de l'esprit. Ce sont les principales forces, représentant les agents les plus importants du bonheur éternel qui sont, comme nous l'avons dit auparavant, la prudence, la justice, la force et la tempérance. Lorsque la prudence est appelée la conscience, ainsi que les hommes l'ont nommé suivant qu'il s'agit de choses religieuses ou humaines, cela signifie que l'homme peut distinguer ce dont il doit se méfier de ce qu'il peut faire, ainsi qu'il est écrit dans les psaumes : "Détourne toi du mal et fait le bien"2. Puis la justice est considérée comme la noblesse de l'esprit, qui préserve le culte de Dieu et la justice de l'humanité, et même ceux de cette vie. Ensuite la force est l'immense vertu de l'esprit, la patience et la persévérance dans les actions de grâce et le triomphe contre des générations de tous les vices. Enfin, la tempérance est pour tous une règle de vie, de peur que tout homme n'aime ou ne haïsse avec trop d'ardeur ; au contraire, le désir tempéré contrôle toute la diversité de cette vie. En vérité, il n'y a aucune sagesse plus grande que celle de reconnaitre Dieu, et grâce à la mesure de l'esprit humain il est craint et son futur royaume est créé. En fait, pourquoi est-il plus juste que nous aimions Dieu et que /342/ nous observions ses commandements, lui qui nous accorde la totalité des choses que nous avons – grâce à lui, alors que nous n'existions pas, nous fûmes créés puis, plus tard, nous fûmes libérés de la servitude diabolique ? Pourquoi est-ce préférable, au-delà de toute force terrestre, que l'on conquiert les démons de l'enfer et que l'on s'oppose vivement à toute chose hostile avec tout notre savoir et pour le nom de Dieu ?
14Mes très chers frères, il est primordial pour nous d'être avertis et sur nos gardes, même si les richesses de cette pauvre vie transitoire nous conviennent totalement, aussi bien celles d'or que celles d'argent ainsi que beaucoup d'autres objets précieux que nous désirons et aimons tant, afin qu'après notre départ de ce monde, ils ne puissent pas nous mener à la souffrance éternelle. Souvenons nous que nous n'emmenons loin de ce monde aucune de ces choses qui ici bas nous plaisent tant, ni celles en or, ni celles en argent, ni aucune des possessions terrestres, mais nous emmenons ce que nous avons fait de bien dans notre vie sans aucune vanité et pour l'amour de Dieu.
15 /343/ Mes bien chers frères, avertissons à présent avec ferveur et en faisant usage de tous les mots dits auparavant, et ayons toujours à l'esprit ceux qui dans ce monde mènent leur vie contre la volonté de Dieu, jusqu'à leur dernier jour, et tous les châtiments, toutes les souffrances, tous les dangers immenses, les flammes terribles, le froid indescriptible et les misérables et inexplicables malheurs qui s'étaient propagés sur la terre à cause d'eux ; et s'ils refusent de concevoir combien ils sont pitoyables et terribles, en retour ils sont prêts pour l'enfer et endureront par la suite une torture perpétuelle. Pourquoi, alors qu'à présent nous en avons les moyens aisément faire la volonté de et que Dieu le premier dans ce monde nous a pardonnés, refusons-nous de faire sa volonté avec diligence et de nous précipiter vers son royaume céleste ? C'est la récompense éternelle, c'est la vie sans la mort, c'est la joie sans la tristesse, c'est la lumière sans les ténèbres, c'est la beauté sans l'altération, c'est le bonheur éternel et la joie éternelle avec le père éternel, avec le fils éternel et avec l'esprit saint éternel, à tout moment.